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L’informatique quantique représente une menace sérieuse pour le Bitcoin et les crypto monnaies. Cette menace redoutée de tous est devenue un peu plus réelle en fin de semaine dernière suite à la publication par Google d’un papier scientifique détaillant comment le géant de Mountain View prétend avoir réussi à atteindre la suprématie quantique.
La suprématie quantique que Google aurait atteinte est quelque chose après lequel de nombreux géants de la technologie dont IBM courent après depuis plusieurs années maintenant. Concrètement, cela signifie que Google aurait mis au point un ordinateur capable d’effectuer des calculs quantiques sans simulation et que cet ordinateur pourrait réaliser des calculs impossibles à simuler dans un ordinateur conventionnel.
La puissance de calculs d’un ordinateur quantique est mesurée en qubit. Pour rappel, en informatique quantique, un qubit est l’état quantique qui représente la plus petite unité de stockage. C’est l’analogue quantique du bit.
Les efforts de Google dans l’informatique quantique ne datent pas d’hier. La firme de Mountain View espérait déjà parvenir à cette suprématie quantique en 2017 avec un ordinateur de 72 qubits mais celui-ci s’était révélé trop instable. Les chercheurs de chez Google avaient donc décidé d’alléger leur système pour tomber à 53 qubits.
C’est justement avec cet ordinateur de 53 qubits, nommé Sycamore, que Google a réussi à effectuer un calcul très complexe en tout juste 200 secondes là où le supercalculateur le plus puissant du monde aurait dû travailler sans interruption pendant plus de 10000 ans pour y parvenir !
Le papier scientifique publiait par Google a ensuite très rapidement été retiré sans que Google n’en donne les raisons. Néanmoins, ce papier avait déjà eu le temps de faire couler beaucoup d’encre dans le monde de l’informatique. Les autres acteurs visant la suprématie quantique de longue date n’ont donc pas tardé à réagir. Très en pointe sur le sujet, IBM refuse d’admettre que Google a atteint ce fameux Graal.
Pour Big Blue, l’ordinateur quantique mis au point par Google a été exclusivement conçu pour réaliser un calcul bien précis et son utilisation ne peut donc être généralisée. Pour rappel, IBM avait déjà réussi en Novembre 2017 à faire fonctionner un processeur de 50 qubits pendant 90 microsecondes. Enfin, Intel n’est pas en reste sur le sujet puisque la firme avait présenté un processeur de 49 qubits très prometteur lors du CES de Las Vegas en 2018.
On ne sait pas encore pourquoi Google a rapidement retiré son papier scientifique, et donc s’il a réellement atteint cette fameuse suprématie quantique, mais on prend bien conscience que la course à la suprématie quantique que vont se livrer ces différents acteurs va permettre au secteur de progresser à grande vitesse dans les années à venir.
L’informatique quantique représente une menace pour les algorithmes de cryptographie sur lesquels la Blockchain Bitcoin repose. En effet, l’algorithme de consensus du Bitcoin, la Proof of Work (PoW), est basée sur le SHA-256 alors que l’algorithme ECDSA (Elliptical Curve Digital Signature Algorithm) est utilisé pour créer les paires de clés privées et publiques.
Pour de nombreux scientifiques, si les algorithmes cryptographiques utilisés par le Bitcoin ne sont pas résistants à la puissance quantique en théorie, il faudra encore beaucoup de temps avant que tout ordinateur, qu’il soit quantique ou autre, puisse menacer réellement la sécurité du Bitcoin.
Néanmoins, ce qui inquiète dans le papier scientifique publié par Google est que les chercheurs de la firme envisagent sérieusement la possibilité de doubler la puissance en qubits chaque année. Cela dépasserait la loi de Moore et donnerait la possibilité à Google de disposer d’un ordinateur quantique capable de casser le cryptage militaire dès 2024 !
A court terme, le Bitcoin pourrait passer au SHA-512 ou à un algorithme de cryptage plus fort mais cela ne ferait finalement que reculer l’échéance à laquelle la technologie quantique viendrait à bout de la sécurité offerte par ce type d’algorithmes de cryptographie.
La vitesse à laquelle la puissance des ordinateurs quantiques pourrait croître pose donc questions bien au-delà du Bitcoin et des crypto monnaies. Tous les secteurs vont devoir s’adapter dans les 10 à 20 ans qui viennent.
Le problème est déjà pris très au sérieux par la NSA et ce, depuis longtemps. Les chercheurs de la NSA planchent ainsi depuis plusieurs années sur la création de nouveaux algorithmes de cryptographie qui seraient résistants à la puissance de calculs phénoménale dont disposeront les ordinateurs quantiques du futur.
Le but pour la NSA étant de se prémunir de potentielles attaques de puissances étrangères contre ses intérêts stratégiques.
Ainsi, comme le souligne très bien Andreas Antonopoulos, auteur de nombreux livres qui font foi sur le Bitcoin et les crypto monnaies, si le Bitcoin pourrait être menacé le futur par les ordinateurs quantiques, il ne sera probablement la principale cible. En effet, le Bitcoin ne représente actuellement qu’une manne financière de 175 milliards de dollars. C’est beaucoup et peu à la fois.
Les éventuels hackers auraient plutôt intérêt à cibler des banques ou encore des secrets d’état en tentant pourquoi pas dérober les codes des armes nucléaires pour ensuite exiger des rançons auprès de certains pays. En bref, le Bitcoin et les crypto monnaies ne seraient pas les principales cibles.
Bien conscients que le sujet va prendre de plus en plus d’importance dans les années à venir, certains ont déjà commencé à se positionner dans le secteur. C’est notamment le cas du projet de crypto monnaies Quantum Resistant Ledger qui vise à créer une Blockchain résistante à la puissance de calculs quantique.
Pour Jack Matier, un membre de Quantum Resistant Ledger, la menace planant sur le Bitcoin est beaucoup plus proche que certains l’avancent. Lui parle de risques d’ici 2 à 5 ans. Un tel pessimisme n’est peut-être pas totalement désintéressé.
Connu pour être le parrain de l’argent digital et l’inventeur de nombreux protocoles cryptographiques, David Chaum travaille également sur un projet de crypto monnaies résistant à la puissance quantique. Son projet Praxxis est construit pour résister aux menaces d’attaques représentées par l’algorithme de Shor notamment.
Pour ce faire, Praxxis développe un mécanisme de signatures résistantes à la puissance quantique à l’intérieur même de son mécanisme de consensus.
Cependant, pour réussir à exploiter la puissance quantique et menacer la sécurité du Bitcoin, un papier scientifique du Centre for Cryptocurrency Research and Engineering met en évidence plusieurs exigences fondamentales à respecter. Parmi ces prérequis se trouve notamment la nécessité d’avoir à disposition une puissance de 1500 qubits...
Le Bitcoin n’est donc pas menacé dans l’immédiat et les possesseurs de crypto monnaies peuvent dormir tranquille.
Si le Bitcoin n’est pas menacé dans l’immédiat, il est certain qu’il devra évoluer et s’adapter à la menace nouvelle représentée par les ordinateurs quantiques. Néanmoins, il ne sera pas le seul dans ce cas puisque toutes les industries devront faire de même afin de se prémunir d’attaques exploitant la puissance de calculs quantiques.
A ce propos, une autre raison de ne pas s’alarmer tient au fait qu’il est peu probable de voir des ordinateurs quantiques mis à disposition des particuliers dans le futur. En effet, les matériaux nécessaires à la construction d’un ordinateur quantique sont très chers ce qui donnerait des coûts bien trop élevés.
Les géants de la technologie, de Google à IBM en passant par Microsoft, envisagent plutôt un futur dans lequel ils mettraient à disposition la puissance de calculs de leurs ordinateurs quantiques aux utilisateurs via le Cloud. Tout ceci leur permettant de garder la main sur cette technologie et de conforter leur hégémonie grandissante sur le monde de la technologie.
La question qui se pose étant de savoir si le fait qu’une telle puissance soit entre les mains de Google ou de Microsoft soit une bonne chose. Mais cela est un autre débat sur lequel je reviendrai dans le futur.